Les origines du caodaisme - 2 / 3 Dịch Giả (NTT et LHV)


La table s’est remise à  livrer ses lettres,  en les assemblant nous avons eu : Diêu, Cu, Tac, Sang,Duc, Thân, Nguyên ; nos noms ainsi épelés nous faisaient éclater de rire. De son côté la table semblait participer à cette rigolade,  ne se tenant plus que sur trois pieds, le quatrième dévissé par les chocs.
L’Oncle Cu continua à questionner Luong :

" Mon fils, es-tu avec ton grand-père paternel ? " ;
Réponse : oui
" Peux-tu l’inviter à venir ici ? "
Réponse : oui
A cet instant, la table s’est soulevée puis retombée pour s’immobiliser.
" Il est parti semble-t-il ", disait l’Oncle Cu.

Ils s’éloignaient de la table, pour reprendre souffle. Ils ne me semblaient pas normaux, surtout mon père et son frère, l’Oncle Cu, là assis en s’échangeant des regards.  Eux, qui prétendaient n’avoir aucune croyance en l’au-delà, après la mort, c’est le grand noir, ce soir ils ont été témoins des choses extraordinaires: Dieu a certes laissé entrouverte une porte pour qu’ils perçoivent le Secret.

Une demi-heure après, de nouveau réunis autour de la table, nos mains se touchaient ; avec une attitude déjà plus retenue, nous nous concentrions avec force. La table commençait  à  bouger ; ses bruits dictaient les lettres : " Cao Quynh Tuân " ! Le nom de mon Grand-père paternel. Avec respect, nous nous sommes levés pour le saluer.

Puis mon père évoqua avec lui quelques histoires du passé, simple contrôle en vérité.

L’Oncle Cu prenait la parole :  " le jour de ton décès, nous étions encore très jeunes, même mon grand frère, à l’époque plus âgé, ne se souvient ni de ton visage, ni comment tu étais ; Quant à moi, à l’époque tout petit… Par contre, plus tard à l’âge de raison, nous avons pu entendre des gens parler de tes bontés. Nous nous permettons donc de te demander, s’il est possible, nous laisser un poème que nous conserverons sur l’autel, afin que nous ayons ton souvenir et le transmettions à nos enfants et petits enfants. "


Mon Grand-père, toujours en faisant des bruits avec la table, marqua son accord et nous livra son poème :
" Ly tran tuoi da qua nam muoi,
Mi moi vua nen uoc dang muoi,
Tong men loi khuyen ben mo chep,
Tinh thuong cau dan gang tam doi.

Ben man doi luc treu hon phach,
Coi tho nhieu phen dang thanh thoi,
Xot noi vo hien con lum cum,
Gap nhau nhan nhu mot doi loi ".

" Vous avez à peine 10 ans, j’ai quitté ce monde, la cinquantaine passée, pour rejoindre l’éternité, un milieu détendu, paisible. Parfois, je suis revenu voir ta mère, ma chère femme âgée et malade, être près d’elle pendant son sommeil,... c’est affligeant cette séparation. Je vous aime mes enfants, et pour notre rencontre de ce soir, avec toute mon affection voilà quelques mots pour vous, retenez les bien. "

Au début du poème nous étions très émus, des larmes perlaient nos yeux ; mais au dernier vers, mon père, son frère, l’oncle Tac, Cao Hoai Sang et les autres fondaient en larmes et commençaient à pleurer très fort. Il devait être 2 heures du matin, nos pleurs raisonnaient dans tout le quartier ; quelques voisins étonnés se sont déplacés par curiosité pour voir cette scène inouïe. Ils n’ont absolument rien compris et sont repartis chez eux.

Après avoir donné son poème, mon Grand-père nous a quittés en faisant soulever assez haut la table et la faire descendre tout doucement, en toute légèreté.

" Il est parti, déjà parti ", disaient-ils avec regret.

Ils allaient sous la lumière, recopiaient chacun le poème qu’ils relisaient et relisaient, puis commentaient et complimentaient sans fin.

Voyant ces choses mystérieuses je commençais à y croire, mais je n’ai pas pu encore saisir leurs vraies dimensions.

Mon père, mon oncle et les autres étaient en pleine discussion, ils cherchaient aussi à percer ce Mystère.

Tout le monde est reparti chez soi, sauf  mon père, qui voulait accompagner mon oncle Cu. Tous les deux passaient une nuit blanche à lire, relire le poème, discuter sans relâche. Le lendemain, dimanche, ils poursuivaient cette conversation, en position assise, ensuite à l’horizontale quand la fatigue les prenait,  pendant les repas, pendant la sieste, … quant à moi je me suis endormi jusqu’à 4 heures de l’après-midi. Mon père et moi, nous sommes rentrés à la maison.

Mais, à 19 heures, mon père m’a réveillé, pour manger vite fait et nous préparer à repartir chez  mon cousin Cao hoai Sang. Au fur et à mesure, les autres sont aussi revenus, vers 19H30 autour de la table, avec des encens allumés. Les préparatifs, cette fois-ci, sont plus soignés qu ‘avant.

Je suis assis, comme d’habitude, à côté de mon paternel.

La table s’est mise à bouger, nous communiquer par ses entrechocs et nous avons trouvé : "Mourir par Amour " !  A ces mots, la peur nous saisissait tous. Mon oncle Cu demanda :

- Comment s’appelle-t-il cet esprit ?  Femme ou homme ?
- Réponse :  "  Doàn Ngoc Quê, jeune fille. "

Les nom et prénom sont exacts, les mêmes portant par la personne assise à côté de mon oncle Tac. On se tournait alors vers  Monsieur Quê, et s’éclatait de rire.

Mon Oncle Cu demandait à cet esprit de nous donner un poème relatant son histoire, ce qui fut fait :
" Nôi niem tâm su to cung ai,
Mang bac con xuân uông sac tai,
Nhung ngo trao duyên vào ngoc cac,
Nào de phui no xuong tuyen dai.
Duong sinh cam lôi tinh song nui,
To toc thoi roi nghia truc mai,
Dôn dap tuong tu oan mot ganh,
Nôi niem tâm su to cung ai ?
Ky tên doàn ngoc Huê "

" A qui confier mes sentiments, mes rêves de jeunesse, de beauté et de mariage ? Le destin a volé mes talents et mes amours enfouis dans les profondeurs de la mort.  Je regrette et mes parents et mon pays natal. A qui confier ma nostalgie ? Doan Ngoc  Quê ".

Tous ont fait des compliments sur le ton du poème.  Mon oncle Cu l’a donc invitée à revenir plus souvent pour communiquer avec nous.

A partir de ce jour, tous les soirs nous nous réunissions chez Cao hoai Sanh. Durant toute une semaine, des fois c’était son père qui communiquait avec nous,  d’autres fois le grand frère de mon oncle Tac. Des questions sur certains faits déjà survenus leur ont été soumises, toutes ont été répondues justes ;  mais mon père, mes oncles ont encore gardé un certain doute.

Ils considéraient comme un simple divertissement leur réunissant chaque soir. Jour après jour, la fatigue aidant, il ne restait plus que six personnes dont  : mon père, mes oncles Cu et Tac, Cao Hoai Sang, Nguyên Tai Thân  et moi-même.

Un Samedi du mois d’Août 1925, en l’absence de mon père, nous avons commencé à tourner la table comme d’habitude. Il est apparu mademoiselle Doan Ngoc Quê, qui nous a accordé une longue causerie, passionnant tellement mes deux oncles et Cao Hoai Sang qu’ils lui ont demandé de se fraterniser. Elle nous a acceptés volontiers :
- L’oncle Cu est le grand frère
- L’oncle Tac le second frère
- Cao Hoai Sang le troisième frère
- Elle-même la quatrième sœur.
- Et nous deux, moi et mon frère, elle considérait comme ses 2 petits frères.

Puis, nous avons continué notre causerie sans nous gêner, jusqu’à insister au point qu’elle nous livra sa véritable identité : Vuong Thi Lê, et même l’endroit précis de sa tombe.

A l’aube, nous nous sommes rendus à l’endroit indiqué, et nous avons effectivement trouvé à Phu Tho, proche de Saigon, un agréable endroit, la tombe de Vuong Thi Lê.

Nous étions absolument contents, satisfaits que la Demoiselle ne nous a pas trompés.  On lui demandait alors de nous rejoindre à notre retour chez mon père, afin de tester si dans la journée les esprits pouvaient communiquer avec les êtres-vivants.

A la maison, il était 9 heures du matin. Nous mettions au courant mon père de cette découverte, puis nous nous placions autour d’une table. Encore une fois,  Elle est venue avec nous et confirmait que la tombe de ce matin était bien le lieu du repos de son corps pour l’éternité.

Depuis ce jour, nous avons appris certaines choses sur les mystères de la vie et de la mort, surtout la possibilité de se communiquer en plein jour. Ce qui fut encore plus excitant !

Aussi, le jour comme la nuit, sans se soucier de la fatigue, on ne cessait de parler avec les esprits ;  mon père et mon cousin Cao Hoai Sang faisaient tourner la table chez nous, tandis que les autres les autres chez mon oncle, nos maisons étaient  à quelques pas de distance.

De chaque côté,  jour et nuit, nous voulions pénétrer les mystères avec l’aide de divers défunts. Quelques temps plus tard,  sont apparus deux poètes ;  chez mon oncle c’était monsieur Thanh Son, chez mon père monsieur Nhan Am Dao, chacun laissant dix poèmes différents.

Un soir, ils ont décidé de faire tourner ensemble la table,  à quatre comme avant. Cette fois-ci ils ont osé évoquer l’esprit de Ta Quân Lê van Duyet, (le grand maréchal vénéré au sud Vietnam), qui est quand même venu exaucer leur vœu par un poème.

Une autre fois, nous étions en train de nous poser nos mains sur la table, ce fut mademoiselle Vuong Thi Lê, accompagnée d’une amie qu’elle voulait présenter au groupe :
- Celle-ci est très douée en poésie.
- La nouvelle se présenta :
- je m’appelle Hon Liên Bach. En guise de présentation je me permets de vous offrir un poème, soyez indulgents envers mes vers.

Cao Hoai Sang, sceptique, et par malice, voulais aborder un thème qu'il pensait pouvoir gêner l'esprit féminin  : " En entendant dire que vous êtes très douée en poésie, je me permets de vous proposer le sujet suivant  :   « Adieu mon amour. »

Mais à la surprise générale, sans aucune hésitation et d'un seul trait, la dame Hon Liên Bach expédiait alors un huitain en vers de sept pieds d'une beauté exquise :
"Chia guong can dan truong dinh,
Vang da tram nam tac tâm tinh,
Buoc re ngôi trông con ac xê,
Loi trao, buôn nho lôi trang thinh.

Ngay cho, mây an ngàn dâu khuât,
Dêm bac dèn khuya môt bong nhin,
Lân lua, cô phong xuân thon mon,
Xa xuôi, ai thâu nôi dinh ninh."

" A notre séparation, comme chacun de nous deux gardait la moitié du miroir, notre amour est marqué à jamais pour l'éternité. En regardant seule cette lune silencieuse, témoin de nos promesses d'antan, l'attente perdure dans la nuit entre mon ombre et ma solitude. L'être éloigné, pourrait-t-il me comprendre ? "

Nous étions fortement impressionnés devant cette envolée: " c'est du jamais vu, les plus belles lettres ! ", et poursuivions notre quête poétique sur le même thème de l'amour. En retour nous étions récompensés par de magnifiques versets.

Le charme littéraire de cette femme a conquis doucement et sûrement nos cœurs et notre croyance en l'existence des esprits.

Les autres fois, nos hommes cherchaient à diversifier les interlocuteurs, en faisant venir d'autres esprits poètes, qui avaient été de leur vivant des amateurs de poésie reconnus , tel le défunt Huynh Thiên Kiêu, personnalité notoire à Saigon et ancien ami de  Nguyên Trung Hâu.

Afin de vérifier la véracité des vers transmis par son ancien ami Huynh Thiên Kiêu, Nguyên Trung Hâu a composé lui-même un poème, puis il l'a fait brûler en espérant avec la fumée le faire parvenir jusqu'à son ami dans l'au-delà.

La réponse de l'esprit poète Huynh Thiên Kiêu est venue sans tarder et des échanges de poésie avec l'au-delà se passèrent gaiement, dans la bonne ambiance. De temps en temps, d'autres esprits participèrent à ce jeu littéraire. Notre dame Hon Liên Bach est venu ainsi nous livrer ses vers d’une beauté inattendue sur le Printemps.

Chaque nuit, ils se sont adonnés à ces loisirs poétiques. A travers des poèmes, certains esprits ont essayé de communiquer des messages plus spirituels.

Un jour du mois d'août, mes oncles Cu et Tac ont reçu de dame Vuong Thi Lê  la révélation sur l'existence du  "Palais de la Mère Diêu Tri"  :
- La gouvernance est assurée au sommet par la Mère divine (Mère Diêu Tri);
- Après, en dessous il y a  9 Immortelles,
- Je suis la 7ème Déesse,
- Hon Liên Bach est la 8ème Déesse,

Ainsi de suite,  les sept noms des autres Déesses ont été cités.

Mon oncle Cu, extrêmement content, demandait comment faire pour obtenir la présence de la "Mère Diêu Tri".

La Déesse Vuong Thi Lê, ou 7ème Déesse, indiquait l'obligation de jeûner pendant 3 jours, et de trouver un « Ngoc Co »  (corbeille à bec, instrument composé d'une corbeille cylindrique en osier, munie d'un manche en bois précieux terminé par une tête de phénix), dont personne d'entre nous ne connaissait l'existence.

Elle nous a fait dessiner le "Ngoc Co", semblable à la forme de l'étoile polaire. Elle a donné des explications sur la manière de l'utiliser et demandé à chacun de composer d'avance un poème. Mes oncles et Cao Hoai Sang ont pu emprunter un "Ngoc Co" et garder 3 jours de jeun selon les instructions.

Au troisième jour, le jour du rendez-vous, c'était exactement la nuit de la Mi-automne, le 14 du 8è mois lunaire;  Il faisait très beau à l'extérieur avec la pleine lune dans un ciel dégagé. A l'intérieur, mon oncle Cu décorait la maison, le tout en parfaite harmonie.

A 1 heure tapante, tout le monde était au complet, devant une longue table rectangulaire avec de belles fleurs placées sur les côtés,  un service à thé au milieu de la table et tout autour 9 tasses à thé pour chacune des 9 Immortelles, enfin une grande assiette de fruits frais.
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