
HISTORIQUE DU CAODAÏSME
Avant d'expliquer l'origine du
Caodaïsme, il serait utile, pour détruire les légendes qui se colportent sur le
compte de la nouvelle religion, d'éclairer nos lecteurs sur les mots :
1 . Tam Ky Pho Do (3 ème Amnistie de Dieu)
2 . Cao Dai ou Thuong De (Souverain Suprême)
3 . Thien Nhan (Œil de Dieu) représentant l'image
symbolique de notre Maître Tout-Puissant.
A cet effet, il nous remonter aux annales des différentes actes religieuses
propagées en Chine.
Un message divin du 26 du 4è mois de l'année Binh Dan (1926)
nous prescrivit de nous documenter dans le Phat Tong Nguyen Ly ou origine du Bouddhisme pour retrouver l'explication des caractères Tam Ky Pho Do . Malgré des recherches actives, il ne nous a pas été possible de trouver ce livre dans les vieilles pagodes bouddhistes auxquelles nous nous sommes adressés .
nous prescrivit de nous documenter dans le Phat Tong Nguyen Ly ou origine du Bouddhisme pour retrouver l'explication des caractères Tam Ky Pho Do . Malgré des recherches actives, il ne nous a pas été possible de trouver ce livre dans les vieilles pagodes bouddhistes auxquelles nous nous sommes adressés .
I
Dans le Hoi Duong Nhon Qua (La Survie et le Karma) édité au début de
l'année 1925 par M. Tran Hanh To de la province de Tan-An, nous lisons sous le
titre Giac Me Ca (Exhortation à la vie religieuse) un message reçu d'Esprits
Supérieurs en Chine, vers l'année Mau Than (1908) et dont voici la traduction
des passages essentiels .
"Du haut de la Tour sans toit,
je contemple, dans un moment d'ennui, l'œuvre du Créateur .
"Sur la Montagne du Sud, le
rideau des pins et des sapins réjouit mes yeux ;
"Tournant mes regards vers
l'Océan du Nord, je vois des poissons qui nagent nonchalants ;
"Puis, revenant dans mon
cabinet solitaire, je révèle la vérité cachée .
"Libre aux hommes de me
croire ou de ne pas me croire .
"Si par une grâce du Destin,
il bénéficient de la 3è AMNISTIE DE DIEU,
"Leurs noms figureront dix
mille siècles au Palais de Pourpre".
II
En ce qui concerne les mots Cao Dai, dont la traduction littérale est
Palais Suprême, on les trouve dans les livres de prières bouddhiques.
Thuong tau Cao-Dai ou Prières à Cao-Dai comme dans les commentaires du Dao
Duc Kinh (Livre de la Voie et de la Vertu) de Lao Tseu et dans le Kinh Sam de
Quan Thanh De Quan (Message No 81 du Turenne Chinois, Quan Thanh De des Trois
Royaumes de Chine), paru depuis très longtemps et existant dans toutes les
pagodes dédiée au culte de ce Saint Homme.
L'autre part, les mots Cao Dai sont imprimés dans une édition en caractères
chinois de la Société Biblique Britanique et Etrangère, édition parue en 1913 à
Shanghai. Nous y lisons, en effet, au chapitre 94, 22è alinéa, à peu près ceci
:
" O Jéhova ! Tu es bien le Palais
Suprême (CAO-DAI) où nous prenons refuge :
Oh Dieu ! Tu es bien la Grosse Pièrre,
derrière laquelle nous nous abritons."
III
Quant à " l'Œil de Dieu ", qui matérialise aux yeux imparfaits des
humains l'image du Créateur que nous adorons depuis 1926, il figure sur la
première page du Catéchisme-Album édité par Librairie Saint-Joseph, Tolba et
Simonet, éditeurs (Paris), et existant dans toutes les Eglises Catholiques.
On y lit, en effet, la définition suivante :
" Dieu est esprit, il ne
peut-être vu de nos yeux, ni par conséquent représenté sur une image. Cet Œil
vous rappelle que Dieu est la souveraine Intelligence, qu'il sait tout et voit
tout. On l'encadre du soleil, car Dieu est le vrai Soleil qui éclaire et
réchauffe tout et porte la vie partout, Dieu est la Lumière Eternelle "
D'autre part, dans son message du 26 Février 1926 Ngoc-Hoang-Thuong-De dit
Cao-Dai s'exprime comme suit :
"Ce n'est pas encore le
moment pour vous de savoir pourquoi vous m'adorez par l'image symbolique d'un
Œil. Voici toutefois, en substance, ce que celà signifie :
"L'Oeil est le moteur du
cœur,
"Le maître souverain de la
perception visuelle.
"La perception visuelle
procède du principe intelligent,
"Le principe intelligent
procède du principe divin,
"Le principe divin, c'est
Moi ".
*
* *
Quand Dieu se révèla à Moïse, IL lui dit simplement : "Je suis ce que
je suis", sans achever de dire ce qu'IL est, car dans le langage imparfait
des hommes, il n'y a pas de noms qui puissent l'exprimer. Non seulement, on ne
peut, avec le sens limite des mots, définir l'Être Infini, mais encore on ne
peut se faire une idée de sa nature parce qu'elle dépasse tout les sens, ni de
sa forme parcequ'IL n'a pas de forme. C'est, croyons nous, pour cette raison
que le Maître Tout Puissant s'est fait
présenter symboliquement par un "Œil", ne voulant pas, comme IL l'avait fait à
Moïse, achever de dire comment IL est.
Aristote, une des intelligences les plus vastes qui aient jamais existé,
avait également conçu l'idée de ce symbole de l'Être Suprême. A la question que
lui posa Secundus sur la conception de Dieu, il répondit : "
C'est le Bien existant par lui-même, une Hauteur invisible, un Être qu'on ne
peut comprendre, un Esprit immortel et qui pénètre tout, UN ŒIL TOUJOURS OUVERT
( C'est nous qui soulignons.), l'Essence propre de toutes choses, un Pouvoir
qui a plusieurs noms, une Main Toute-Puissante : Dieu est Lumière, Intelligence
et Force".
Ainsi, cet Œil symbolique signifie que Dieu voit tout, qu'IL est présent
partout et à tout instant, témoin de tout les actes bons ou mauvais de ses
créatures. N'est-ce-pas là le symbole parfait de l'Intelligence Suprême et de
la Lumière Divine, au contact de laquelle s'épure la pensée humaine ?
Puisque rien ne peut échapper à la vigilance et à la perspicacité de l'Être
qui pénètre tout, cet "Œil sacré" que les Caodaïstes voient à chaque instant sur
leur autel, cet Œil qu'ils sentent pénètrer jusqu'au tréfond de leur âme,
cet Œil les juge, les soutient et les
réconforte, les aide et les force au besoin à se tenir dans la voie du bien.
A ceux qui se livrent à nos dépens à des plaisanteries faciles ou à des
insinuations malvaillantes à propos de l'Œil sacré, nous nous contentons de
dire qu'il convient de n'y attacher que le sens et la valeur d'un symbole. A une
certaine étape de son évolution intellectuelle et religieuse, l'homme, pour
comprendre Dieu, l'a fait à son image. Plus affiné, l'esprit humain le voit
aujoud'hui sous une figuration moin matérielle, plus synthétique. Peut-être,
demain, élevé sur un plan supérieur, lui sera t-il donné, par la seule
puissance de l'abstraction, de concevoir l'Etre Suprême dans son essence, de le
contempler face à face dans toute sa splendeur, sans le secours de l'art
humain, dont toutes les créations, depuis les grossiers fétiches de l'Afrique
jusqu'aux chefs-d'œuvre de la peinture et de la sculpture modernes, ne peuvent
en donner que des images plus ou moins imparfaites.
Revenons maintenant à l'historique de la nouvelle religion.
Ce fut au début de l'année Binh Dan (1926)
que le Caodaisme fit son apparition en Cochinchine ou plus exactement à
Saigon. Mais longtemps auparavant, des Esprits missionnaires avaient reçu de
Dieu l'ordre d'en préparer l'avènement.
En effet, dans une séance de spiritisme qui avait eu lieu à la pagode "Mieu
Noi" située à Ben Cat
(Gia Dinh) le 17 du 6è mois de l'année Qui Hoi (30 Juillet 1923), l'Esprit
Tao-Quoc-Cuu avait révélé ce qui suit :
"Tâchez de vous initier au
Dao (Tao) pour n'avoir pas à le regretter. Il est donné rarement aux humains d'en
trouver l'occasion, car le Dao est une chose très précieuse, et rien au monde
ne peut lui être comparé. Vous avez le bonheur et la bonne fortune de voir le
Dao apparaître pour la 3è fois. Si vous en jouissez avant les autres, c'est que
vous y êtes prédestinés. C'est par une grâce du Destin que le don de la
Troisième Amnistie de Dieu (Tam-Ky Pho-Do) vous échoit en partage. Des Esprits
Supérieurs sont venus en mission ici-bas pour le sauvetage des âmes
prédestinées. Vous êtes de celles-là. Il dépend donc de votre foi agissante
d'obtenir le succès".
D'autres messages non moins édifiants reçus :
a) Le 2 Septembre 1923 à la Pagode de Ngoc Hoang (l'Empereur des Cieux) à Dakao (Saigon);
b) Le 1er du mois de l'an Qui Hoi (1923) à la Pagode Cung-Toan-Hoa (Chine),
de Thuong De (Souverain Suprême);
c) Le 13 du 8è mois de l'an Qui Hoi (1923) à la même Pagode, de l'Esprit
Ton Ngo Khong;
d) Le 30 du 10è mois de l'an Giap Ty (1924) à la même pagode, de l'Esprit
Confucius;
e) Le 4 du 11è mois de l'an Giap Ty (1924) à la même pagode, de l'Esprit
Thai At,
laissaient pressentir également l'avènement du Caodaïsme. Il serait
fastidieux de les énumérer tous.
Si l'on se reporte à la Bible, on verra que c'est bien aujoud'hui la
Troisième Révélation qui s'est manifestée de la part de Dieu( les 1ère et 2è
Révélations furent personnifiées dans Moïse et le Christ en Occident, et dans
Çakya-Mouni et Laotseu en Orient).
Le Christ n'a-t-il pas dit : " Beaucoup de choses que je vous dis, vous
ne pourrez les comprendre, et j'aurais beaucoup d'autres à vous dire que vous
ne comprendriez pas; c'est pourquoi je vous parte en paraboles; mais plus tard,
je vous enverrai le Consolateur, l'Esprit de Vérité, qui rétablira toutes les
choses et vous les expliquera toutes". Jean,chap. XIVXVI; Mathieu chap. XVII).
*
* *
Ce fut, avons-nous dit, au début de l'année Binh-Dan (1926) que le
Caodaïsme fut définitivement fondé. Mais depuis six ans dejà, un homme adorait
le Grand Maître Cao Dai : M. le Phu Ngo Van Chieu, alors en service au 2è
Bureau du Gouvernement de la Cochinchine.
Délégué administratif, en 1919, au poste de Phu Quoc, île située dans le
Golfe de Siam, M. Ngo Van Chieu menait une vie de haute sagesse, conforme aux
règles rigoureuses de la Doctrine Taoiste. De temps en temps, dans cette
localité isolée si propice à la vie religieuse, il s'adonnait, à l'aide de
jeunes médiums de 12 a 15 ans, à l'évocation des Esprits Supérieurs
(Cau Tien) de qui il recevait les instructions nécessaires à son évolution
spirituelle. Parmi les Esprits communicants, il s'en trouvait un qui se nommait
Cao Dai et s'intéressait de façon particulière au Phu Chieu.
Au début, ce nom souleva l'étonnement général des personnes présentes,
parce qu'à leur connaissance aucun livre religieux n'en avait fait mention. Néanmoins,
le Phu Chieu, dont la perspicacité faisait l'admiration de ses camarades, crut
y reconnaître un surnom de Dieu à cause des révélations et des enseignements
d'une haute portée philosophique qu'il en avait reçus à maintes reprises.
Ayant demandé à Cao Dai la permission de l'adorer sous une forme tangible,
il en reçut l'ordre de le représenter par un œil symbolique.
Telle fut la conversion du premier caodaïste à la nouvelle religion qui
devait, six années plus tard, s'implanter à Saigon. Bientôt, les fonctions
administratives du Phu Chieu le rappelèrent à la capitale, où il conquit
quelques prosélytes à la Foi nouvelle. Mais quittons pour le moment ces
premiers convertis pour montrer aux lecteurs la manière dont le Grand Maître
recruta ses médiums.
*
* *
C'était au milieu de l'année At Suu (1925), un petit groupe de secrétaires
annamites appartenant à diverses administrations à Saigon, se délassaient
chaque soir, en faisant du spiritisme. Il se servaient à cet effet de la "table
frappante". Les premiers
essais furent médiocres. Mais à force de patience et d'entrainement , ils
obtinrent des résultats positifs. Aux questions posées aux Esprit, soit en
vers, sois en prose, ils recevaient des réponses surprenantes. Leurs parents ou
amis défunts se manifestèrent pour leur parler d'affaires de famille et leur
conseiller en même temps l'abnégation. Ces révélations sensationnelles leur
apprirent ainsi l'existence d'un monde occulte.
Toutefois un des Esprits communicants se faisait remarquer particulièrement
par son assiduité et ses enseignements d'une haute portée morale et
philosophique. Cet Esprit qui
signait sous ce pseudonyme " ĂĂÂ " ne voulait pas se faire connaître, malgré les
prières des assistants. Bientôt, d'autres secrétaires annamites vinrent grossir
ce petit groupe de spirites-amateurs. Les séances devinrent alors plus
sérieuses et plus régulières. Comme l'emploi de la "table frappante" n'était pas commode, l'Esprit en question la
fit remplacer par la "corbeille à bec". Avec cet appareil qui permet l'écriture
directe, les communications devinrent naturellement plus rapides et moins
fatiguantes pour les apprentis médiums.
Le 24 Décembre 1925, à l'occasion de la Noël, l'Esprit guide qui s'était
obstine jusque-là à garder l'anonymat, se révéla enfin aux néo-spirites comme
étant L'Être Suprême venant sous le nom de Cao Dai pour enseigner la Vérité au
pays d'Annam. S'exprimant en Annamite. Il dit en substance :
" Réjouissez vous de cette
fête. C'est l'anniversaire de ma venue en Europe pour enseigner ma doctrine. Je
suis très heureux de vous voir, ô disciples pleins de respect et d'amour, à mon
égard. Cette maison (Maison d'un des médiums.) aura toutes mes bénédictions.
Les manifestations de ma Toute-Puissance vous inspireront encore plus de
respect et d'amour à mon égard ..."
Dès lors, le Grand Maître initia ses disciples à la doctrine nouvelle.
Tel fut le recrutement des premiers médiums chargés de la réception des
messages divins.
*
* *
Conversion de M. Lê Vän Trung, Entrepreneur des services publics, ancien membre du Conseil Colonial de la Cochinchine et du Conseil du
Gouvernement de l'Indochine.
C'était également en 1925 M . Le Van Trung habitait à Cholon-Ville. Adonné
à diverses entreprises, dans le tumulte de cette ville vouée au culte de
l'argent, il avait l'esprit complètement éloigné de la religion. Un soir, sur
l'invitation d'un de ses parents, spirite convaincu et appartenant à
une secte religieuse dite "Minh Ly" (Cette secte est, comme celle de Minh Tan,
Minh Thien, née du spiritisme depuis ces dernières années) à Saigon, il se
rendit à une séance médiumnique qui devait avoir lieu dans la banlieue à Cho
Gao.
A cette réunion, ce fut l'Esprit Ly Thai Bach qui se manifesta. Prenant à
part M. Trung, il lui révéla son origine spirituelle et lui annonça en même
temps sa prochaine mission religieuse. Il l'exhorta alors à se soumettre
aussitôt au régime imposé par la foi nouvelle. Touché par la grâce, M. Trung
changea sans hésiter de vie. Soutenu par sa foi il eut le courage de cesser
aussitôt de fumer l'opium et de suivre le régime végétarien ; il abandonna
également ses entreprises pour pouvoir se consacrer entièrement à la religion.
La conversion de cet homme, hier encore si attaché aux biens et aux
jouissances de la vie, est si frappante qu'on peut se demander si les séances
spirites organisées jusque-là à Cho Gao, n'avaient pas été inspirées par les
Esprits missionnaires dans l'unique but de ramener M. Le Van Trung dans la voie
de la Loi. En effet, lorsque celui-ci eut prit la résolution de vivre selon la
foi nouvelle qu'il avait embrassée, ils ordonnèrent la dispersion du groupe
spirite, au grand étonnement et à la profonde affliction de ses membres.
A Saigon, le Grand Maître, jugeant le moment venu, rapprocha ses médiums de
M.Le Van Trung. Il envoya alors deux de ceux-ci (MM. Cu et Tac) chez le nouveau
converti, avec ordre d'y organiser une séance au cours de laquelle,il lui
donnerait des instructions.
M.Trung, qui ne connaissait pas ces médiums, accepta cependant leur
proposition lorsqu'il eut appris les motifs de leur démarche.
Une séance évocatoire eut lieu. Le Grand Maître, entre autres
enseignements, annonça à M.Trung sa grande mission prochaine dans la nouvelle
religion qu'il allait fonder pour sauver l'humanité.
Cette révélation confirmait les allusions des divers messages spirites que M. Trung avait reçu à
Cho Gao avec d'autres médiums. Elle fortifia sa conviction et l'encouragea à se
consacrer sans réserve aux pratiques religieuses.
Quelque temps après, le Grand Maître envoya MM Trung, Cu et Tac auprès du
Phu Chieu, qui devait les guider dans la voie religieuse en qualité de frère
aîné. Celui-ci qui, de son côté, en avait été instruit par le Grand Maître,
leur fit le plus cordial accueil, il les mit immédiatement en contact avec ses
premiers coreligionnaires. Le noyau caodaïste fut ainsi formé, qui comprenait
une douzaine de membres tous de culture française et employés pour la plupart
dans diverses Administrations à Saigon.
La faveur et le désintéressement de ces pionniers de la première heure
attirèrent bientôt à eux un nombre d'adhérents de plus en plus élevé. La
religion Caodaïste sortit alors de son cercle restreint pour se répandre dans
le peuple au début de l'an Binh Dan (1926).
M. le Phu Chieu, habitué à la solitude, fut contrarié par l'affluence des
adeptes, qui l'inquiéta. Fonctionnaire conscient de ses devoir, il prit la
résolution de se tenir désormais à l'écart de ce grand mouvement religieux. M
Le Van Trung fut alors désigné par le Grand Maître pour le remplacer vers fin
Avril.
LES PREMIERS ORATOIRES
Les séances spirites continuèrent de plus en plus nombreuses chez des
particuliers, et principalement dans les oratoires organisés, dans chacun des
centres suivants : Cholonville, Cangiuoc, Locgiang, TanDinh, ThuDuc et CauKho
Deux médiums furent affectés à chaque oratoire pour recevoir les
renseignements du Grand Maître. L'admission des nouveaux adeptes y fut
également décidée. Les adhésions vinrent en masse; elles sélevèrent même à
plusieurs certaines d'inscriptions nouvelles à chaque séance.
LA DÉCLARATION OFFICIELLE DU
CAODAÏSME
La nouvelle religion prit très rapidement de l'extension, tant elle fut
reçu avec enthousiasme surtout par le peuple. Soucieux d'agir au grand jour et
de se tenir dans les limites de la plus stricte légalité, ses dirigeants en
firent une déclaration officielle signée de 28 personnes, qu'ils adressèrent à
la date du 7 Septembre 1926 à M.le Gouverneur de la Cochinchine A cette
déclaration, fut jointe aussi une liste d'adeptes comportant les signatures des
247 adeptes présents à la cérémonie ayant consacré l'existence officielle du
Caodaïsme.
LA PROPAGANDE
Après avoir fait cette déclaration, à laquelle le Gouvernement local avait
réservé un acceuil courtois,les dirigeants de la "Grand Voie" organisèrent des missions de propagande dans
l'intérieur.
Celle-ci étaient au nombre de trois dont une, pour les provinces de l'Est,
une pour celles du Centre et une pour celles de l'ouest.
En moin de deux mois, plus de 20.000 personnes, parmi lesquelles de
nombreuses notabilités indigènes, se convertirent à la nouvelle religion. Ce
fut grâce au spiritisme, et surtout à l'Infinie Bonté de Dieu, qui se manifesta
toujours à chaque prière invocatoire et dont les messages eurent une influence
décisive sur les assistants, que le Caodaïsme doit ces conversions en masse.
Ce grand succès est dû également à la forme du nouveau culte, lequel n'a
rien de contraire à ceux des principales religions pratiquées dans le pays.
LA FÊTE DE L'AVÈNEMENT DU
CAODAÏSME
Dès le 10è jour du 10è mois (14-11-26), les tournées de propagande furent
interrompues. Tous les efforts des dirigeants furent concentrés sur la fête de
l'avènement du Caodaïsme. Celle-ci eut lieu les 14,15 et 16 du 10è mois de
l'année Binh Dân (18,19 et 20 Novembre 1926, dans la pagode "Tu Lam
Tu" située à Go Ken (Tây Ninh). Le Gouverneur Général de l'Indochine ainsi
que le Gouverneur de la Cochinchine et les grands fonctionnaires européens et
indigènes y furent invités.
Célébrée avec solennité, cette fête réunit un nombre considérable d'adeptes
accourus de toutes les provinces de la Cochinchine. Elle attira également des
milliers de profanes venus en curieux aussi bien qu'en observateurs. La
présence de M.le capitaine Monet, un grand spirite français, y fut également
remarquée.
Ce fut pendant cette fête que le Sacerdoce Caodaïste fut institué et que le
nouveau Code religieux fut établi et promulgué.
LE SIÈGE DÉFINITIF DU CAODAÏSME
Le Tu Lam Tu est une pagode bouddhiste nouvellement construite par le Hoa
Thuong Giac Hai de Cho Gao (Cholon), qui l'avait affectée à la nouvelle
religion, à laquelle il avait été converti. Mais après la fête, les fidèles bouddhistes, qui avaient
fourni les fonds pour l'édification de ce temple et qui n'avaient pas été
consultés sur sa désaffectation,
réclamèrent son retour à sa destination primitive.
D'autre part,l'expérience avait démontré que cette pagode était trop petite
et que le terrain sur lequel elle était bâtie était trop exigu pour permettre
d'installer convenablement le Siège de la nouvelle religion naissante, appelée
à un grand avenir .
Sur les indications d'un esprit supérieur, le terrain sur lequel se trouve
actuellement le Temple provisoire, fut donc choisi et acheté pour y fixer
définitivement le Saint Siège Caodaïque. Située au village de Long Thành,
province Tây Ninh, il est assez vaste (100 Ha . environ) pour répondre aux besoins actuels et futurs.
Le transfert du Temple de Go Kén à Long Thành eut lieu en Mars 1927. Le
nombre des adeptes continuait à augmenter considérablement. Le mouvement des
pélerins au nouveau temple provisoire mérite d'être noté : c'était par milliers
qu'on les y recevait chaque jour.
Comme toutes les autres religions à leur début, le Caodaïsme a aussi des
adversaires dont les critiques, souvent trop passionnées, ne sont pas toujours
dictées par un esprit suffisamment objectif.
Cependant, les dirigeants caodaïstes, obéissant aux instructions du Grand
Maître
s'efforcent de se maintenir et de se perfectionner dans la Grande Voie, en
ayant uniquement en vue de bien moral et spirituel de l'humanité. C'est la
seule réponse qui leur soit permise aux attaques dont ils sont l'objet, car
tout vrai Caodaïste réserve à lui même sa vérité.
Enfin, après quatre années d'existence, le Caodaïsme compte déjà un demi
million d'adeptes. Et malgré les multiples obstacles semés sur son chemin, il
continue toujours sa marche triomphante vers le but que Dieu lui assigne :
la régénération de l'humanité dans la
paix universelle.
LE CAODAÏSME
Ses Buts - Sa Doctrine
Le Dai Dao Tam Ky Pho Do (3e Amnistie de Dieu en Orient) appelé Caodaïsme
en français, est une Religion fondée sur les enseignements données par Ngoc
Hoang Thuong De (DIEU) qui prend comme fondateur de la religion nouvelle, le
nom de Cao Dai (Le Très-Haut).
Il prêche la pratique de la doctrine rénovée, en grande partie tirée de la
fusion des trois principales et plus vieilles religions de l'Orient Le
Bouddhisme, le Taoïsme, le Confucianisme.
Dans un message transmis le 13 Janvier 1927, en présence de quelques
Français, l'Esprit Ly Thai Bach, un des Ministres de DIEU, exposa ainsi la
nouvelle doctrine.
Parlant aux officiants annamites :
" Le Grand Maître me
confère, leur disait-il la mission de donner quelques instructions sur le Dai
Dao à ses adeptes, qui sont vos aînés, et qui sont à cette séance, vos
invités".
Puis s'adressant aux assistants français :
"Loin d'exploiter votre crédulité par de puériles sorcelleries ou des
prophéties charlatanesques, je tiens particulièrement, chers frères, à vous
faire comprendre l'unité de cette Religion, la seule capable de ramener la Paix
universelle.
La doctrine de cette Religion est répandue actuellement sur plusieurs
points du globe, sous différentes formes.
Combattre l'hérésie, semer parmi les peuples l'amour du bien et des
créatures de DIEU, la pratique de la vertu; apprendre à aimer la justice et la
résignation ; révéler aux humains les conséquences posthumes de leurs actes,
tout en assainissant leur âme, tel est l'idéal du Dai Dao.
Les Saintes Doctrines des diverses religions sont mal pratiquées. L'ordre
et la paix du temps jadis s'effacent. La loi morale de l'humanité est trahie. Pour
les irréfléchis et les sceptiques. DIEU n'existe que par le mot. Ils ignorent
qu'en ce lieu suprême, règne un Personnage. Maître souverain de tous les êtres,
de tous les événements de l'Univers et de toutes les destinées humaines. Ils
marchent aveuglement sur le chemin du péché sans se soucier de la punition qui
leur sera réservée.
Chers frères, le Christ misécordieuxet venu parmi vous pour vous tracer le
chemin du bien. Tâchez de le suivre pour avoir plus tard la paix de l'âme ;
avancez chaque jour d'un pas alerte dans l'amour de DIEU. Unissez vous, aimez
vous les uns les autres, aidez vous mutuellement, c'est la loi divine.
En ce monde, où chacun est condamné à subir son purgatoire,si l'on cherche
à semer partout misères et souffrances, on risquera d'être entrainédans ce
torrent inferral où le méchant va briser sa vie et souiller son âme".
D'autre part, pour réaliser l'unité fraternelle des religions, le Caodaïsme
pratique la plus large tolérance envers toutes les formes de la loi
religieuse,se réservant toutefois de les ramener,par la persuasion, à l'Unité
primordiale.
C'est dans ce but que le Maître Suprême a entrepris, dès la naissance du
Caodaïsme, la fusion du Boudhisme, du Taoïsme et du Confucianisme, dont il
recommance à ses fidèles de vénérer les fondateurs à l'égal du Christ.
Voici comment le Grand Maître explique la nécessité de fusionner les
diverses religions, dans un message dont nous empruntons, sauf la dernière
phrase, la belle traduction à M.G.Coulet.
Autrefois les peuples ne se connaissaient pas et manquaient de moyen de
transports. Je fondais alors, à différentes époques, cinq branches de la Grand
Voie (Dai Dao):
1 . Nhon Dao :
le Confucianisme,
2 . Than Dao
: le Khuong Thai Cong, Culte des
Génies,
3 . Thanh Dao:
le Christianisme,
4 . Tien
Dao :
le Taoïsme,
5 . Phat
Dao : le Bouddhisme,
Chacun basé sur les us et
coutumes des races appelées particulièrement à les pratiquer.
Aujourd'hui, toutes les parties du monde sont explorées : l'humanité qui se
connait mieux, aspire à une paix réelle.Mais à cause de la multiplicité même de
ces religions, les hommes ne vivent pas toujours en harmonie les uns avec les
autres. C'est pourquoi j'ai décidé de réunir toutes ces religions en une seule,
pour les ramener à l'unité primordiale.
Au sur plus, la sainte doctrine
de ces religions a été, à travers les siècles, de plus en plus dénaturée par
ceux-là mêmes qui étaient chargés de la répandre, à tel point que j'ai prit
aujourd'hui la ferme résolution de venir Moi-même vous indiquer la voie à
suivre".
Tel est dans ses grandes lignes, l'exposé doctrinal de la nouvelle
religion, exposé sur lequel nous reviendrons en détail un peu plus loin.
Voués depuis quatre ans sans relâche à la propagande de la nouvelle
doctrine, à travers des difficultés de tous ordres, nous sommes parvenus à
conquérir à la foi caodaïste un demi million (en 1930) environ de fidèles de
différentes nationalités. Ce magnifique résultat, qui ne peut que nous
encouager à persévérer dans notre mission, n'a pu être obtenu que grâce à
l'Infinie Bonté de Dieu, notre Grand Maître et notre Père à Tous.
LES PRINCIPES FONDAMENTAUX
DE LA DOCTRINE CAODAÏSTE
Cao-Dai, disions-nous, est simplement un nom symbolique de l'Être Suprême
qui, pour la troisième fois, s'est révélé en Orient (voir l'Historique du
Caodaïsme).
Au lieu de venir, comme pour les deux premières révélations, sous une forme
humaine, Dieu, adaptant son enseignement aux progrès de l'esprit humain, plus
affiné qu'autrefois, s'est aujourd'hui manifesté par voie de médiumnité, ne
voulant accorder à aucun mortel, fût il
un sage ou un initié, le privilège de se poser en fondateur du
Caodaïsme. C'est ce qui constitue le caractère d'universalitéde ce dernier. En
effet, toute religion, soumise à l'autorité 'd'un fondateur humain, a été
reconnue impropre à devenir universelle; car ses adeptes attachés à la
personnalité de ce fondateur, se refusaient à accepter les vérités proclamées
par d'autres fois religieuses à l'égard desquelles ils témoignaient une
intolérance parfois regrettable.
Si la doctrine Caodaïste est,en grande partie tirée de celle des anciennes
religions de l'Orient c'est que, pour
réaliser l'unité religieuse, elle s'en assimile les purs principes reconnus
comme étant des vérités éternelles,
l'expression de la Loi Divine. Or, aux vérités éternelles, à la Loi Divine, le
Caodaïsme ne peut que conformer ses dogmes et ses principes. Mais là où
certaines vérités sont déformées par les conceptions superstitueuses de
l'ignorance, la nouvelle religion se charge de les rétablir dans leur véritable
sens.
Ainsi présentée, la doctrine Caodaïste tend, non seulement à concilier
toutes les convictions religieuses, mais encore à s'adapter à tous les degrés
de l'évolution spirituelle.
Au point de vue moral, elle rappelle à l'homme ses devoirs envers lui-même,
envers sa famille, envers la société qui est une famille élargie, puis envers
l'Humanité, la famille universelle.
Au point de vue philosophique, elle prêche le mépris des honneurs, de la
richesse, du luxe, en un mot l'affranchissement des servitudes de la matière
pour chercher, dans la spiritualité, la pleine quiétude de l'âme.
Au point de vue culturel, elle recommande l'adoration de Dieu, notre Père à
tous, et la vénération des Esprits Supérieurs, qui constituent l'Auguste
Hiérarchie occulte. Admettant le culte national des ancêtres elle proscrit
cependant les offrandes carnées, ainsi que l'usage des papiers votifs.
Au point de vue spiritualiste, elle confirme d'accord avec d'autres
religions et avec les systèmes de philosophie spiritualiste et psychique,
l'existence de l'âme, sa survivance au corps physique, son évolution par
réincarnations successives, les conséquences posthumes des actions humaines
réglées par la loi du karma.
Au point de vue initiatique, elle communique à ceux des adeptes qui en
seront dignes, les enseignements révélés qui leur permettront par un processus
d'évolution spirituelle, d'accéder aux ravissements de la béatitude...
Nous pensons avoir, à grands traits, exposé la nouvelle doctrine. Nous
convions tous ceux que cette doctrine aura satisfaits, à se joindre à nous pour
travailler en commun à l'œuvre de fraternisation spirituelle de toutes les
religions.
LES ADEPTES DU CAODAÏSME
et le CORPS SACERDOTAL
Les adeptes du Caodaïsme sont de deux degrés, le "thuong
thua" (degré supérieur),
et le "ha thua" (degré inférieur). Rentrent dans le premier degré,
tous les religieux proprement dits ; ils peuvent être digitaires ou simples
adeptes. A ce titre, ils sont astreints à laisser pousser leur barbe et leurs
cheveux, à suivre un régime d'alimentation exclusivement végétarien, à
s'interdire le luxe et les relations sexuelles. Leur vie affranchie des
servitudes de la matière, est entièrement vouée au service de la religion.
Les adeptes du second degré comprennent la masse des croyants, qui
continuent à vaquer à leurs occupations normales; leur devoir religieux
consiste à pratiquer quotidiennement le culte et à observer les règles de
conduite prescrites par le Nouveau Code religieux (Tân luat). Les uns comme les
autres sont astreints aux "Ngu gioi cam" (les panchashila) interditions tirées de la
morale bouddhique et qui
commandent de: ne pas tuer, ne pas
être cupide, ne pas commettre d'acte de luxure, ne pas faire grande chère, ne
pas pécher en paroles.
En ce qui concerne le régime d'alimentation que doivent suivre les adeptes
du second degré, il leur est prescrit un végétarisme graduel consistant à
s'abstenir des aliments carnés un nombre déterminé de jours en mois.
Ainsi, ils débutent par le "soc vong", régime temporaire des deux jours; puis
passent successivement au "luc trai", régime des 6 jours, et au "thap
trai" régime des 10
jours.
Le Caodaïsme admet dans son sein toutes les bonnes volontés sans
distinction de race, ni de rang social. Le simple dan y coudoie fraternellement
le Doc phu su. Les adeptes se distinguent seulement par leurs mérites
religieux, sur la base desquels est établie la hiérarchie nécessaire à la
conduite de la masse des fidèles.
A l'occasion de la fête de l'avènement du Dai Dao, qui eut lieu les 18, 19
et 20 Novembre 1926, il fut formé conformément aux communications de Dieu, un
corps sacerdotal qui comprend numériquement:
1 Giao Tong,
3 Chuong Phap
3 Dau Su
36 Phoi Su
72 Giao Su
3000 Giao Huu et des Le Sanh en nombre illimité.
Leurs missions respectives sont déterminées dans le code religieux que le
lecteur trouvera plus loin.
LE CULTE CAODAÏSTE
Ses Rites - Ses Symboles
De la conscience que l'homme est tenu à des devoirs envers DIEU qui l'a
créé, est né le sentiment l'adoration. L'ensemble des actes par lesquels nous
témoignons à Dieu ce sentiment d'adoration, constitue ce que nous appelons le
culte. Il en est de même du culte Caodaïste. Celui-ci se pratique chaque jour,
dans les oratoires comme dans les maisons privées, en quatre temps (tu thoi): à
6 heures, à midi, à 18 heures, puis à minuit. Prosternés devant l'autel Divin,
dans l'élan de notre âme vers l'Être Suprême, nous commençons par accomplir le
rite de l'offertoire de l'encens (niem huong). Vient ensuite celui de
l'ouverture des prières (khai kinh) dont la formule peut être ainsi traduite :
"Au-dessus de l'Océan de la
douleur humaine, dont l'immensité se perde entre le ciel et l'eau, déjà l'Astre
du jour point à l'Orient.
"L'Auguste Instructeur Thai
Thuong Duc Ong (Lao Tseu) a eu le mérite d'aider au salut de l'Humanité.
"Les Trois Religions
enseignent comme base de leurs doctrines, la pratique du bien et de la vertu.
"Le Sage Confucius a
nettement tracé la voie du Juste Milieu.
"Le Miséricordieux Bouddha a
prêché la dévotion et la charité.
"La doctrine Taoiste a
prescrit le culte du vrai et la discipline du caractère.
"Ainsi un même tronc a donné
naissance à trois branches similaires.
"Que l'Homme qui se pénètre
de cette vérité profonde, se purifie le cœur pour réciter les saintes
prières".
Ces formalités remplies, nous nous mettons à entonner en chœr un cantique à
la Gloire de Dieu puis trois autres en l'honneur des Trois Saints (Conficius,
Laotseu, Bouddha).
Tel est, dans toute sa simplicité, le rite du culte quotidien. Quant à
l'office divin célébré dans les oratoires, les jours de grande cérémonie, il
comporte un cérémonial plus imposant.
Les dignitaires du sexe masculin, dans leur costume de cérémonie dont la
couleur est déterminée par la branche à laquelle ils appartiennent (La couleur
jaune symbolise le Bouddhisme, la couleur bleue, le Taoisme, la couleur rouge,
le Confucianisme), se prosternent par rangées transversales, sur la natte
étendue devant l'autel divin, auquel ils font face. A leur droite et devant
l'autel de Quan-Thanh De Quan, sont agenouillés, sur une autre natte, les
adeptes du même sexe (Nam phai), tous vêtus de blanc avec sur leur tête, le
traditionnel turban noir.
A gauche et faisant face à l'autel de Quan Am Bo Tat, sont prosternées,
dans les mêmes conditions que leurs coreligionnaires de droite, les adeptes du
sexe féminin (Nu phai) également vêtues de blanc; quant aux dignitaires, elles
se distinguent des simples adeptes par la forme spéciale de leur costume.
Les prières sont partout les mêmes; mais ici, elles sont accordées à
l'harmonie musicale et récitées d'après les commandements proférés par des
maîtres de cérémonie (Le Sanh).
*
* *
On nous reproche de nous absorber inutilement dans de longues prières,
alléguant que le temps consacré à cette obligation devrait être mieux employé.
Nous reconnaîtrions volontiers le bien-fondé de ce reproche, si les prières
que nous pratiquons consistaient en une récitation monotone de mots
intelligibles d'où serait exclue la pensée du cœur. Mais pratiquée avec
intelligence et ferveur, énergique et remplie d'onction, la prière, acte de
foi, est non seulement un acte d'adoration, mais encore une élévation de notre
cœur, un élan de notre âme vers l'Être Suprême.
Dans l'état actuel de leur évolution religieuse, la masse des fidèles
caodaïstes ont besoin d'acquérir une volonté telle qu'elle leur permettre de
résister aux tensions matérielles en toutes les circonstances,et de s'entourer
d'une ambiance pure, qui écarte d'eux les idées mauvaises et les influences
inférieures de l'espace.
Cette volonté, pour être efficace, doit être soutenue par la foi. Or la
pratique répétée de la prière affermit en eux cette foi si précieuse, en même
temps qu'elle leur permet de s'attirer, par
la pureté de leur cœur, les forces protectrices de l'Au-delà.
D'autre part, il n'ya rien de plus ravissant, de plus sublime que de
rentrer en -dedans de soi-même, oubliantchaque jour, pour quelques heures de
prière fervente, les affaires et le monde pour élever sa pensée vers Dieu avec
Qui on traite seul à seul.
Tel est le but de la prière, qui doit être journellement pratiquée par les
simples fidèles. Demain, élevés à un degré supérieur d'évolution, ils sauront
la ramener à sa forme abstraite, intérieure : la méditation
Au point de vue invocatoire, nous prions pour les personnes malades,
malheureuses, pour qui nous demandons à Dieu, non la jouissance d'un bien
matériel, d'un intérêt personnel, mais le prompt retour à la santé, ou la
faveur d'un appui moral, occulte, leur permettant de subir, sans faiblesse, une
épreuve ou une conséquence karmique.
Nous prions également pour les esprits souffrants, malheureux, sur qui nous
appelons la miséricorde divine.
Ainsi faite, la prière constitue l'une des pratiques nécessaires au salut
des âmes.
Le culte caodaïste, outre qu'il constitue un acte d'adoration, renferme un
symbolisme qu'à titre de simple indication, nous allons expliquer sommairement
à nos lecteurs.
La disposition de l'autel, tel que l'a décrit M.G. Coulet,
n'est que le symbole de la fusion dans l'unité des cinq branches de la Grande
Voie ( Ngu Chi Dai Dao). Mais les objets cultuels, les offrandes, etc...portent
un cachet secret, un sens symbolique.
LES OBJETS CULTUELS.- Au milieu de
l'autel, est tenu constamment allumée une lampe à verre sphérique (Thai Cuc
Dang) symbolisant la monade Universelle (Thai Cuc).
A l'origine des âges, l'Univers, croyons-nous, était constitué par la
Monade, qui est l'Âme Universelle, la
Forme Non-Manifestée de Dieu.
Par ses manifestations, la Monade présenta successivement ses deux Aspects mâle et fermelle (Luong
Nghi) (C'est, d'après les théosophes, la première grande séparation entre
l'Esprit et la Matière) représentés sur l'autel par deux feux allumés (Luong Nghi
Quang).
LES OFFRANDES.- Les offrandes de fleurs, d'alcool et de thé symbolisent
respectivement les trois éléments constitutifs de l'être humain: le Tinh, le
Khi et le Than.
Le Tinh, ainsi que son nom l'indique, est l'essence de toutes les matières,
le sperme cosmique, sans lequel aucune vie ne saurait se manifester. C'est
l'énergie sexuelle de l'homme et de l'animal, la vertu germinative de la
plante. Par son évaporation, le Tinh, qui réside dans l'homme, constitue la
partie grossière du périsprit. Il est au corps périsprital ce que la chair est
au corps physique.
Le Khi, qui litéralement veut dire souffle, air, est chez l'homme la santé,
la force, l'énergie vitale. C'est, dans le périsprit, l'agent qui unit l'âme au
corps physique qu'il vivifie.
Le Than, principe intelligent, est double chez l'être humain : le mental
supérieur (duong-than ou hon) est l'Esprit divin dans l'homme ; le mental
inférieur (âm-thân ou phach) est la partie la plus subtile du périsprit.
Convertir l'énergie sexuelle en énergie vitale (luyen tinh hoa khi)
l'énergie vitale en énergie mentale (luyen khi hoa than), l'énergie mental en
force spirituelle (luyen than huon hu), tel est le processus de la purification
mystique des trois éléments constitutifs de l'être humain.
Quant aux bâtons d'encens que nous brûlons à chaque cérémonie, ils sont
invariablement au nombre de cinq. Or, ce nombre symbolique représent les cinq
degrés de l'Initiation :
1. - Gioi huong
: la pureté (Shila)
2. - Dinh huong
: la méditation (Dhyna)
3. - Hue huong
: la sagesse (Prajna)
4. - Tri kien huong : la connaissance supérieure
(Djnana)
5. - Giai thoat huong : la libération karmique
(Apavarga).
Pour être admis au seuil de l'Initiation, la première condition pour
l'adepte est la pureté sous toutes ses formes: pureté du corps, de l'acte, du
langage,de la pensée.
Une fois le seuil franchi, il s'applique à la méditation. Par cet exercice
spirituel, l'adeptedont la pensée et les sensations s'isolent du monde des
sens, élève son âme vers le Soi Supérieur, avec lequel il la met en rapport
intime. Dans le tête-à-tête de ce receuillement intérieur porté jusqu'à la plus
complète abstraction et où l'âme humaine cherche à s'identifier avec l'Âme
universelle, les vérités luisent peu à peu dans l'esprit de l'adepte sans que
rien au monde ne puisse le leurrer d'apparences illusoires.
A un plus haut degré d'ascension, il sent en son être le plein éveil de la
connaissance supérieure, qui lui fait percevoir toutes les vérités éternelles
et embrasser, sans le moindre effort,
l'ensemble du passé et de l'avenir. Dans cet état de suprême sagesse, il peut
contempler, sans en être ébloui, la Lumière Divine, lumière qui purifie,
illumine et béatifie. Devant lui, s'ouvre alors la voie du salut : la
libération karmique.
LE CAODAÏSME et LA LIBERTE DE
CONSCIENCE
L'Homme, à quelque nation et à quelque classe sociale qu'il appartienne, se
reconnaît-il le droit de penser selon sa propre intuition ? Certes, toutes les
institutions démocratiques y répondent par l'affirmative.Il faut reconnaître
cependant que la conquête de ce droit a coûté à l'homme plus d'un sacrifice. Le
célèbre philosophe Italien Giordano Bruno fut brûlée à Rome pour avoir proclamé
la liberté de la pensée. Son sublime dévouement à la cause démocratique est un
bel exemple pour les penseurs de tous les pays ; ainsi, s'établit dans le monde
la libre pensée, mère de la tolérance.
L'Intolérance, on le sait, a été la cause d'affreux conflits, d'abominables
persécutions, qui remplissent en lettres de sang, les pages de l'Histoire des
Religions.
Il est des moments de l'esprit humain où le besoin de croire à la Divinité
devient une nécessité impérieuse. L'homme , dès qu'il est conscient de son
origine céleste et du but de ces pérégrinations terrestres, cherche, selon la
foi, son salut dans la doctrine qu'il embrasse. Il ne demande qu'à adorerson
Dieu dans la paix et le silence et dans la mesure compatible avec le maintien
de l'ordre public. Ne serait-ce pas un crime de troubler sa conscience ?
A son début, le Caodaïsme, malgré la neutralité administrative pour
laquelle nous tenons à rendre un respectueux hommage au Gouvernement local en
la personne de M.Blanchard de la Brosse, fut l'objet d'attaques passionnées de
la part de ses adversaires et de vexations souvent tracassières de celle de
certains agents administratifs trop portés, hélas ! à devancer ou à mal
comprendre les ordres de leurs chefs.
Avec la sérénité de l'âme, qui n'a rien à se reprocher, le Caodaïsme
répondit aux uns comme aux autres par le silence et l'humilité. C'est là sa
faiblesse et sa force; c'est aussi sa ligne de conduite dont, à aucun prix, il
ne se départira.
Il fait mieux encore : il respecte toutes les croyances d'autrui quand ces
croyances ne sont pas de nature à conduire au fanatisme et à l'hérésie.
Sans être polythéiste de fait, il
l'estpar principe, car en dehors de l'adoration officielle du Dieu Suprême, il
permet à ses adeptes la libre vénération d'autres dieux qui conquièrent leur
cœur. Si parfois, dans des circonstances exceptionnelles, il lui arrive de
reprocher aux pratiquants de certaines religions d'avoir dénaturé la sainte
doctrine de leurs fondateurs, il se garde de prononcer une parole tant soit peu
désobligeante à l'encontre de ces derniers, qu'il considère, en principe, comme
étant de haute émanation divine.
Enfin, le Caodaïsme ignore l'esprit étroit de race et les patries
terrestres, qu'il confond dans l'Unité divine qui embrasse tout l'univers. Il
admet comme universelle toute religion fondée sur les révélations de la
conscience et du cœur ou sur la nature psychique de l'individu et sur les
sentiments d'amour et de solidarité de la société humaine. Il tend ainsi à
synthétiser tous les systèmes religieux et philosophiques, auquels il emprunte
les enseignements qui touchent de plus près à la vérité pour en former un corps
de doctrine capable de satisfaire au besoin de certitude métaphysique des âmes
contemporaines...
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